06/10/2012
Ce matin vers sept heures et demie, un nuage venu de l'île de la passion
20:11 | Lien permanent | Commentaires (12)
L'absence de coquetterie, la discrétion, pas de tapage, le latin ?
Ils sont trois écrivains dans une émission de télévision qui passe à 20h30, ils sont dans ce décor affreux dont il faut faire abstraction, et faire abstraction aussi de celui qui leur pose des questions avec ce sourire collé sur sa figure -on dirait mon chef - mais qui n'est pas forcément un mauvais bougre -mon chef je ne sais pas- et ça s'appelle donc, nom idiot aussi, dont il faut faire abstraction: "La grande librairie". Je regarde une fois par an quand j'ai envie de regarder (mais je ne me souviens ni de la dernière fois, ni de l'avant-dernière; j'ai dû, de ce souvenir, faire abstraction!)
Ils sont donc trois mercredi dernier: Modiano, Echenoz, Quignard. Ils sont nés en 1945, 1947, 1948. Ils ne passent pas à la télévision pour se faire voir, pour se faire connaître, pour se faire plaisir, pour s'écouter parler (encore que Quignard...non, j'exagère!), ils sont venus sans rien attendre, sans rien vouloir, parce que leur éditeur leur a demandé, enfin non il ne leur a même pas demandé, mais parce que c'est ainsi et qu'il y a plus de gens à embêter en ne venant pas qu'en venant. Ils préfèrent s'embêter eux. Refuser de venir serait une coquetterie fatigante.
Ils sont donc là, trois hommes dont les visages et les corps n'ont pas vieilli pareil, et c'est ce qu'on voit en premier, Modiano aux aguets avec ce beau visage perdu qu'il a depuis toujours, Echenoz tassé qui devient beau avec le temps, qui a gagné une espèce de force très séduisante, Quignard avec cette tête de vieilllard magnifique à faire tomber les jeunes filles et qui le sait (ce pull en V sur sa peau nue) et qui est le plus jeune pourtant. (il agace les hommes en général).
Echenoz était très timide (quand je vendais des livres je l'ai rencontré), Modiano a gardé cette timidité qui n'en est pas une, et qui est plutôt un égarement.
Voilà. La discrétion d'Echenoz avec dans son oeil un poil d'ironie et celle de Modiano qui dit toujours "c'est compliqué...", rendraient Quignard un peu mondain quand même, un peu "je suis un grand écrivain et je ris seulement quand je me coince le pied sous la porte". Pourtant, quand à un moment il dit curieusement, alors qu'on ne lui a rien demandé, "j'ai appris à être enfin heureux" ou quelque chose comme ça, on est touché de cet aveu, on sent qu'il serait prêt à dire pourquoi, mais Busnel ne lui demande pas. Busnel a ses questions, pas toujours bêtes d'ailleurs, préparées à l'avance et millimétrées selon le timing de l'émission, et je ne sais pas si d'ailleurs il a entendu. Pourtant j'aurais aimé l'écouter dire pourquoi. Tout en redoutant qu'il dise quelque chose comme "j'ai enfin le sentiment de faire une oeuvre", plutôt que de répondre "parce que j'ai supprimé la viande, je cours deux heures par jour, et je prends des bains moussants". Mais c'est pure sottise de ma part ,car il dit aussi cela, et c'est beau, qu'il veut se noyer dans quelque chose sans fin qu'il écrirait, qu'il ne "sait pas pourquoi, ça le rassure".
Ainsi voilà: Quignard a cet attrait du gars dont on ne sait pas s'il est tête à claques ou pas. Et comme dirait maman "c'est un érudit". Qui ne sait pas monter à cheval. Il l'a dit parce que finaud Busnel lui a demandé. Vu que son dernier livre s'appelle "Les désarçonnés". Et Quignard a répondu "Non, nous sommes une famille d'intellectuels, de musiciens". Du dernier comique comme réponse. Tellement aristocratique. Je ne monte pas à cheval car dans ma famille on ne monte pas à cheval. Je ne vais pas à la fête de l'Huma parce que dans ma famille on ne mange pas des merguez.
C'est tellement beau de voir un être qui vieillit. Modiano était ce Paul Auster français -oui j'ai des comparaisons débiles- et puis là il est devenu ce vieux monsieur au cou empâté, pas empâté par la gourmandise, non, son visage simplement s'est défait, comme s'il s'effondrait et allait se dissoudre, le contraire de Quignard dont le visage s'est aiguisé comme une belle tête de mort. Ce visage de Modiano qu'il offre au regard est une des plus belles choses que j'ai vues depuis longtemps, une des plus vraies, des plus humaines, des plus fortes.
Echenoz fait figure à côté de collégien. Non, pas de collégien. D'homme simple, sans tapage. Pas même le tapage de son coeur. A côté delui, Modiano et Quiganrd chacun à sa façon ont quelque chose de tapageur.
Tous les trois ont écrit tellement de livres. Dans une interview Modiano disait il n'y a pas longtemps qu'il aimerait vraiment "être débarrassé du besoin d'écrire". Mais que ça ne vient pas.
Ils étaient donc là, disant en peu de mots, très sobres, leur estime mutuelle, même s'ils ne se voyaient pas. Ils disaient qu'ils se lisaient, j'ai trouvé ça beau.
Echenoz vient de faire paraître "14" sur la guerre de quatorze, 124 pages "où il y a tout" dit Busnel, ah ah. En tout cas il coûte 14 €. (1 € par page). Il parlait mercredi soir des carnets retrouvés d'un soldat de sa famille qui écrivait dans les tranchées ses carnets en latin pour qu'ils ne soient pas lus par d'autres. Il semble que cela arrivait souvent. Je ne savais pas cela qui est magnifique. Ce n'est pas Quignard que ça dégoûte. Modiano écoutait, dont on a horreur qu'il puisse mourir un jour, pensée qui ne m'a pas quittée.
Ils n'avaient tous les trois, aucune vulgarité.
08:54 | Lien permanent | Commentaires (15)
05/10/2012
Un ravissant chapeau pour quand la pluie passe par là
collection Alexander Mac Qeen présentée il y a 3 jours (photo Libération)
Je trouve ça magnifique. Vous me direz peut-être: ce n'est pas pratique pour conduire. Mais qui parle de conduire? D'ailleurs je n'ai pas le permis. Non, n'est-ce-pas vous ne direz pas ça? Vous admirerez cette beauté, ce brocard, ces perles. Le collier apporte la chaleur dont l'épaule a besoin. Le chapeau apporte le mystère qui convient. Il est de guerre et d'amour, comme un heaume tout brodé..
Allez, à nos abat-jour ce week-end! Cette chose exquise est au bout de nos fils, de nos aiguilles, et de nos doigts de fée!
Ne pas oublier d'imperméabiliser (8 € 95 la bombe, sur le site maxagaz.com -"le matos futé du motard")
20:31 | Lien permanent | Commentaires (6)