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01/11/2012

Un cadeau inattendu

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De Grèce où notre espion séjourne toujours -dans une île près de la côte turque - notre espion m'envoie une photo de cette carte qui l'amuse. Notre espion sait que ça va m'amuser. Et comme la vie est folle, au moment où je reçois sa photo le téléphone sonne, c'est la voisine du dessus (celle qui écoute Chopin). Bon, jusqu'ici ce n'est pas follement fou dites -vous. Attendez.

Donc la voisine dit, c'est la Toussaint il est midi: "J'attends un livreur de canapé...j'ai pensé...enfin j'ai hésité....enfin voilà...c'est à dire que peut-être il ne vous plaira pas...bon voilà...est-ce que mon ancien canapé vous intéresse? mais peut-être que je vous dérange? Oui j'ai hésité il y a des gens qui...enfin que..." Et moi je réponds: "Ah mais c'est très gentil, un canapé j'en rêvais. Parce qu'il y a un canapé à la maison mais en fait c'est un clic- clac alors il n'a pas d'accoudoirs bref je me lance dans des explications, parler clic clac le jour de la Toussaint voilà qui est parfait, la grêle se met à tomber juste après un coup de tonerre que rien n'annonçait et qui semblait signer la fin du monde "enfin venez le voir, dit-elle, peut-être qu'il ne vous plaira pas mais j'ai pensé à vous j'ai demandé un peu autour de moi et voilà". Moi très romantique:" Mais vous le vendez ou vous le donnez?" Elle avec entrain:" Mais je le donne, sil il vous plait je vous le donne, sinon il ira à la déchetterie" (là je me dis: oui il y en a en effet qui pourraient être vexés ! Je dis "C'est trop trop gentil, et ça tombe bien chez nous c'est quasi une déchetterie" tout en me demandant où ça va être possible de loger ici un deuxième canapé, un deuxième canapé c'est un peu comme une deuxième femme c'est du souci.

"Mais j'entends les livreurs qui sonnent" s'exclame-t-elle, montez!" (on est en plein "Au théâtre ce soir" !). Moi, chochotte "Oui mais je ne suis pas maquillée et je viens de me laver les cheveux, je vais faire peur au canapé". Elle rit, elle a un rire...cristallin. Je ne sais pas exactement à quoi ressemble un rire cristallin, mais je pense que c'est comme ça. Une fois on l'a emmenée avec nous à un concert, elle avait mis des jolies chaussures à talons, un peu sur son 31, charmante. Elle a euh disons...55 ans (le plus bel âge de la vie!), par là. Elle est mince et elle a un fils. Et une fois elle avait proposé de garder Absinthe. Mais je n'ai jamais mis les pieds chez elle. Je ne sais pas pourquoi j'ai l'impression que le canapé va avoir des franges violettes, un peu genre canapé de Sarah Bernhard. Je suis partagée entre une grande appréhension et un grand désir (un peu comme si j'allais à un rendez-vous avec un inconnu, le genre "mon dieu si ce canapé est un gros lourdaud, je vais lui dire quoi? mon dieu s'il me trouve horrible?" brrrrrrr! le sang coule fort dans mes veines!)

Il grêle, le rôti de porc va être trop cuit -oui parce qu'il y a un invité qui n'arrive pas, il est dans les embouteillages à cause du Salon du Chocolat, quelles vies passionnantes, le chat veut s'enfuir (aller au Salon du Chocochat?), il y en a qui sont encore limite en pyjama, bref branle-bas de combat.

Chez la voisine, tout est luxe moche calme et volupté (elle est très excitée par la livraison de son nouveau canapé et pousse des gentils petits cris mignons en disant: "si ça se trouve je vais le regretter", en montrant l'ancien canapé destiné à descendre d'un étage. C'est un moment particulièrement bouleversant!)

La scène est donc comme ça: son appartement, très zen, très lumineux, pas un livre à l'horizon, "j'adore la décoration" me dit-elle (comme Emmanuelle Seigner dans le film d'Ozon) et un grand canapé vert d'eau - "Roche et Bobois" précise-t-elle d'un air entendu et moi "Oui, c'est jamais de la crotte", elle pouffe. La couleur et la texture (une sorte de velours râpé indescriptible) sont atroces. Mais avec un grand tissu dessus, je me dis que ça sera parfait, très bien. Au même moment elle ajoute:" Pour le protéger vous pouvez mettre dessus un grand tissu" !!!! "Oui oui, je dis je le protégerai" . tu parles, plutôt deux fois qu'une!

Donc je disais la scène est comme ça: son appartement, les deux livreurs du dépôt-vente où elle a acheté son nouveau canapé -qui font tellement livreurs qu'on dirait des acteurs qui jouent les livreurs-, leur espèce de gouaille et leur amabilité moqueuse et moi qui dit connement pour dire quelque chose : "vous livrez même les jours fériés?" et eux "ma petite dame, c'est la crise, on travaille tous les jours" et elle, la jolie voisine un peu fofolle qui semble toujours vaciller, qui retire l'espèce de couverture dégueu qui enveloppe son acquisition en disant "c'est vingt -tage" (elle prononce comme ça "vintage") et découvre un canapé ancien en cuir marron tirant sur le rouge "je le voyais moins rouge" dit-elle le sourcil froncé puis elle se reprend aussitôt "bah ça ne fait rien, il va bien avec mes fauteuils...mais quand même ça change, ça fait une tâche sombre", et pendant qu'elle parle depuis tout  l'heure elle me tapote le bras comme pour s'esclaffer, comme pour dire "je suis impayable". Elle aussi, on dirait une actrice. Peut-être Delphine Seyrig (sauf la voix grave si belle). Les gars descendent le premier canapé à la maison, la pluie s'est brusquement arrêtée, j'embrasse la voisine, enfin pas sur la bouche, vous avez picolé!, qui a l'air vraiment contente de me faire plaisir, et moi c'est vrai que ça me fait très plaisir. Son nouveau canapé est horrible. Mais celui-là -recouvert d'un tissu- sera très bien, il EST très bien. Mis à côté de l'autre canapé, du clic-clac donc, c'est bien vous suivez !, c'est .....comment dire.....ça relève du génie. On dirait qu'on est chez les fous! Enfin c'est très cosy. Je vous assure je suis ravie.

 

Et surtout, surtout, le tout n'a duré qu'une demi-heure. Surprise. Annonce. Action. Réalisation. Fin de l'action. Un peu le sentiment d'abriter un canapé sans-papier à la maison. Adopté. Parachuté. Il y en a une qui peut-être, en rentrant d'Espagne, va hurler. Va dire que je suis cinglée mais j'y suis habituée.  Et je dirai: "Les accoudoirs, les accoudoirs!"

Le principal c'est ça: je me sens comme une reine. Avec ses accoudoirs. Comblée déjà avant Noël. Voilà la vérité !



 

 

 

 

 

"S'il te plait, refais des patates sautées" (un peintre découvert ce matin en cherchant des tableaux "représentant" la Toussaint)

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"Ombres portées",  ou "S'il te plait, refais des patates sautées" Emile  Friant 1891 (au musée d'Orsay)

 

-désolée pour la ligne en bas du tableau, faites comme si elle n'existait pas , d'ailleurs elle n'existe pas!-

 

 

Au cimetière (oui ça va je sais, les défunts, normalement c'est demain!)

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Toussaint, Emile Friant, musée des beaux-arts de Nancy (1888)

 

 

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La Toussaint, Julien Bastien-Lepage (qui est né le 1er novembre 1848) , musée des beaux-arts de Budapest