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17/01/2015

Cui-cui, les oiseaux sont arrivés dans la cuisine au-dessus de l'évier

Photo-0445.jpgNon la France n'est pas un pays en guerre, oui cette hystérie m'inquiète -sans m'étonner, oui cette charlimania relève de la psychiatrie, oui ils sont malins ceux qui se sentaient heureux d'être nombreux dimanche au rassemblement géant car ne sont-ils pas nombreux aussi ceux qui aujourd'hui partout dans le monde musulman manifestent contre les caricatures de Charlie-Hebdo, oui je fais partie de ceux qui pensent que ce n'était pas indispensable que Charlie-Hebdo remette le couvert avec Mahomet mercredi dernier, ça aurait pu être intelligent de passer à autre chose, oui évidemment ce rassemblement et ce déploiement d'unité nationale n'ont rien arrangé, voire ont aggravé les choses, oui les rodomontades "même pas peur" sont ridicules - si "même pas peur" alors pourquoi des mesures de sécurité exceptionnelles?- il y en a, ça par contre c'est sûr, qui n'ont pas peur des contradictions, oui cui cui cui.

 

 

 

Oui, merci Lina, je me suis trompée hier, c'était la photo d'Aragon

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16/01/2015

"Ne suis-je plus ton coeur?" Bon anniversaire Jules Supervielle qui est né le 16 janvier 1884

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" UN HOMME A LA MER

 

A Alfredo Camgotena

 

  Du haut du navire en marche
Je me suis jeté
Et voilà que je me mets à courir autour de lui.
Heureusement nul ne m'a vu :
5   Chacun craindrait pour sa raison.
Je suis debout sur les flots aussi facilement que la
lumière,
Et songe à l'intervalle miraculeux entre les vagues
et mes semelles.
10   Je m'allonge sur le dos, moi qui ne sais même pas
nager ni faire la planche
Et ne parviens pas à me mouiller.
Voici des êtres qui viennent à moi
Appuyés sur des béquilles aquatiques et levant les
15   paumes;
Mais ils meurent crachant l'écume par leur bouche
devenue immense.
Je reste seul et, dans ma joie,
Je m'enfante plusieurs fois de suite solennellement,
20   Ivre d'avoir goûté autant de fois à la mort.
Je vais, je viens, les mains dans mes poches sèches
comme le Sahara,
Tout ceci est à moi et les domaines qui palpitent
là-dessous.
25   Oserai-je prendre un peu de cette eau pour voir
comment elle est faite ?
Ce sera pour un autre jour.
Contentons-nous de marcher sur la mer comme
autour d'une poésie.
30   Au fond de ma lorgnette je ne vois plus du bateau
Que mes trente bâtards qui s'agitent à bord
singulièrement
Dans le miroir de ma cabine et en travers
J'ai laissé mon image au milieu de la nuit avant que
35   je tourne le commutateur.
Elle se réveille en sursaut, brise la glace comme celle
d'un avertisseur d'incendie
Et se met à me chercher.
La poitrine très velue du Commandant éprouve
40   qu'il manque quelqu'un
Et la sirène beugle toute seule
Comme une vache qui a faim.
Prenant la mer un peu à l'écart
Je lui fais signe d'entrer ruisselante dans l'entonnoir
45   de mon esprit :
"Viens, il y a place pour toi,
Viens aujourd'hui il y a de la place.
J'en fais serment tête nue
Pour que le vent de l'ouest sur mon front reconnaisse
50   que je dis la vérité".
Mais la mer proteste de son innocence
Et dit qu'on l'accuse témérairement.
Elle ne répond pas à la question.
Et cependant les noyés attendent que leur tour
55   vienne.
leur tour de quoi ; leur tour de n’importe quoi.
Ils attendent sans oser entr'ouvrir leurs paupières
écumeuses
De peur que ce ne soit pas encore le moment,
60   Et qu'il faille continuer à mourir comme jusqu'à
présent.
Cette chose qui les a frôlés, qu'est-ce que c'est ?
Est-ce une algue marine ou la queue d'un poisson
qui s'égare au fond de lui-même ?
65   C’est bien autre chose.
Il est des anges sous-marins qui n'ont jamais vu
la face bouleversée de Dieu.
Il rôdent et sans le savoir
Lancent la foudre divine.
70   Ce soir assis sur le rebord du crépuscule
Et les pieds balancés au-dessus des vagues,
Je regarderai descendre la nuit : elle se croira toute
seule.
Et mon cœur me dira : fais de moi quelque chose,
75   Ne suis-je plus ton cœur ? "