Au café du Grand Canal

Le vrai journal de Gombrowicz(1904-1969)

J'ai découvert Gombrowicz à la fac quand j'avais une vingtaine d'années. J'avais une UV (on disait UV à l'époque, une matière quoi) de littérature polonaise. C'était un peu idiot étant donné que je connaissais très mal la littérature française, mais bon c'était comme ça. Pas logique mais en un sens très bien, puisque cela m'a permis de connaître des écrivains que je n'aurais jamais connus sans cela. Gombrowicz faisait partie d'eux. J'adorais son prénom: Witold.

Est-ce que je vous ai déjà raconté qu'à l'époque je vivais avec un gars - très chiant à vivre- féru de musique mais aussi de littérature, et qui portait "Ferdydurke" aux nues? Ferdydurke publié en 1937 par Gombrowicz est une charge magistrale contre l'infantilisation du monde, puisque c'est l'histoire d'un type qui est forcé de retourner dans son enfance. Ce qui est rigolo - si on peut dire-  c'est que le héros a trente ans, il est sensé être adulte, en 1937 on était adulte à 30 ans, alors qu'aujourd'hui il est entendu qu'à 30 ans on est encore un ado. Gombrowicz avait tout prévu de ce qui allait se passer. Bref, j'entendais parler de lui comme d'un génie. Et j'aimais beaucoup aussi le titre de sa pièce de théâtre: "Yvonne, princesse de Bourgogne" - que je n'ai jamais lue je m'empresse de vous le dire car ne croyez pas que je suis cultivée, j'ai juste un vernis comme ça mais il n'y a pas grand chose dessous je vous assure sincèrement-.

A cette époque Gombro, comme on dit si on veut faire genre, était très à la mode. Il est passé de mode. Mais aujourd'hui Stock publie son vrai journal, communiqué par sa veuve. Je dis vrai parce qu'il y a eu un autre Journal qui était en fait un recueil de textes.

J'ai très envie de le lire. En plus, il est préfacé par Yann Moix et je sais que personne ne sera d'accord avec moi, mais j'aime beaucoup Yann Moix. Même si tout le monde dit que je suis folle. Je n'en démords pas !

 

Un chat sur un piano

L'autre jour je me disais qu'un chat sur un piano, c'est vraiment une image de douceur, et que tiens, pendant un prochain voyage en métro, ce serait agréable de penser à ça, ma maison idéale, exactement comme à quinze ans, on imagine son amoureux -enfin moi je faisais ça, je me souviens même que ce garçon rêvé était sensé s'appeler Thomas, avec les yeux bleus, les cheveux très noirs, et un certain pull bleu marine - bon, oui, j'étais folle à quinze ans, non pas vous ?- , et donc tandis que le métro m'emportait vers le boulot, j'ai pensé à une cheminée, une cheminée qui marche bien sûr, un piano droit, un grand canapé ancien avec un dos arrondi, couleur framboise écrasée, une cuisine avec une porte donnant sur un jardin,une salle de bain avec une grande fenêtre et des porte-serviettes chauffant, devant un arbre, un tilleul par exemple, des boiseries dans les chambres, un grand dressing-room super bien rangé (ah ah), un frigo ultra moderne, un sèche-linge, un lave-vaisselle, une buanderie, et puis une porte d'entrée avec des vitraux et une marquise, un perron avec des marches rondes, une balançoire dans le jardin, une table de ping-pong, des jonquilles au printemps, un lilas mauve et un lilas blanc, des fauteuils crapaud dans le salon, des portraits d'ancêtres aux murs. Et un jardin d'hiver plein de plantes grasses, de pots de géraniums, et de confitures.

En deux secondes je suis arrivée à ma station, je n'avais pas vu la demi-heure passer, j'en étais au papier-peint dans les toilettes.