12/12/2014
Jusqu'à sept heures trente
Tom Wasselmann
Bon, où j'en étais? Oui, au matin. Tiens, prenons ce matin. Il est sept heures moins le quart. Aucun bruit au pied des tours encore obscures, juste celui d'un petit groupe de feuilles qui tombent. (Oui oui, j'ai remarqué ça ce matin, un gracieux bruit de feuilles qui tombent vers la gauche sur une place de parking). Les premières personnes du dehors que je vois, ce sont les gars des poubelles. Ils arrivent quand je m'en vais, ce qui veut dire qu'ils partent vers cinq heures du matin de chez eux pour s'occuper de nos poubelles. Ils sont extrêmement courtois, j'aime particulièrement le moustachu qui ressemble à Omar Sharif et qui tous les jours en faisant très bien la liaison me répond : "Vous -z-aussi" quand je lui dis bonne journée.
Ensuite je vois le saule emmêlé au houx. (Je n'explique pas, vous comprenez).
Je regarde le ciel, les nuages qui bougent dans l'obscurité, peut-être la lune qui joue à cache-cache (et j'essaie de ne pas glisser sur les feuilles mortes luisantes de pluie) et je pense aux steppes d'asie centrale, aux romarins dans les jardins, à plein de choses qui me viennent à l'esprit. Sur ce chemin heureusement, je ne pense jamais au boulot, je ne sais pas pourquoi.
J'arrive devant le petit casino qui est sur l'autre trottoir. Car des fois je marche sur le trottoir de gauche, des fois sur le trottoir de droite. Ce n'est pas moi qui décide, ce sont mes jambes. Les petites fofolles. En ce moment est planté devant le petit casino, le sapin de Noël annuel, tout illuminé de guirlandes électriques blanches et bleues assez moches mais qui me ravissent. Le petit casino c'est la frontière. Passé le petit casino je passe en terre étrangère !
Voilà la gare. Figurez-vous une gare de livre d'enfant, une gare toute mignonne, restée dans son jus, une adorable gare. Juste derrière l'unique café: le "Rallye". Tenu il y a quelques années par un type qui se vantait de dormir avec un flingue sous son oreiller pour buter tout le monde, tenu maintenant par un couple charmantissime, lui grand, discret, elle ravissante, timide, avec des boucles brunes noires comme un rêve, des dents éclatantes, très douce et discrète. (Ils ont deux enfants super mignons.) Ils sont beaux et doux. En général j'achète "Libération", des fois "La Croix", très rarement "l'Huma", "Elle" le vendredi -donc ce matin !-
Et j'attends qu'un train veuille bien arriver. Tchou tchou tchou. (C'est un train à vapeur). A cette heure là le matin, sauf s'il y a eu un problème (trains précédents supprimés, envolés, volatilisés) je trouve une place assise. Quand le train ralentit je me maquille. Sinon je lis le journal. C'est comme ça: je ne peux pas facilement lire un livre dans le train, ça m'arrive, mais ça me donne toujours l'impression d'être nue devant tout le monde. Alors que le journal ça va. Je regarde les autres passagers. Comment les filles sont habillées, comment les femmes sont coiffées, je regarde les hommes, je regarde le paysage, je regarde mon téléphone portable. Mon chéri me dit "Bien arrivé. Je t'aime". Louise me dit "Tu sais pas où est mon pull bleu?" ou blanc ou noir ou beige ou rose ou etc. Des fois ma soeur aussi m'envoie un texto. "T'es où?" qu'elle me demande. Elle me dit les RV qu'elle a dans la journée. Elle rencontre assez souvent des gens connus, "intéressants". Ou bien elle est en voyage pour son travail. Elle m'envoie des photos. Ce que j'adore. Même si je suis jalouse. Et en même temps, non.
je dis ça, mais très souvent dans le train le matin je m'endors. je me réveille ensuite en sursaut, je ne sais plus si on est le matin ou le soir, horreur on est le matin, je ne rentre pas à la maison !
14:18 | Lien permanent | Commentaires (6)
11/12/2014
Ce n'est pas exprès
David Hockney
Ce n'est pas exprès que j'écris moins de billets et que je réponds en retard aux commentaires. Voilà. Je voulais le dire et que les français le sachent. C'est parce que je n'ai plus beaucoup de temps, voire plus du tout. Par exemple là je me suis réveillée à quatre heures et demie et donc je me suis dit bon je me lève comme ça j'aurai un peu de temps. C'est pour ça. Mais donc voilà. Est-ce que vous me croyez? Bon je vais vous faire un reportage sur ma vie quotidienne depuis que je travaille tous les jours. Parce que quand j'ai commencé ce blog c'était en plein mois d'août et puis je travaillais à mon compte c'est à dire que j'avais du temps libre et plein d'angoisses, et puis un ou deux ans après juste après la mort de mon père je suis redevenue salariée (il est chiant ce billet hein!) mais je ne travaillais pas le mercredi (et ça change tout les amis, ça change tout) et puis il y a un an et demi j'avais un vendredi sur deux qui était libre, et puis depuis le premier septembre de cette année je travaille tous les jours, mue par lapadugain. Et j'ai beaucoup de transports. Au cas où vous ne le sauriez pas si vous êtes un martien. Donc reportage.
5h 45: le réveil sonne. ou plutôt mon téléphone portable toujours posé sous mon lit (garantie cancer du cerveau). Je me lève d'un bond. J'essaie de me souvenir quel âge j'ai. Oui c'est toujours la première chose que je fais le matin. Je me souviens alors que j'ai des enfants. Et j'essaie de me rappeler où ils sont. Est-ce que Louise dort là? Est-ce que j'ai eu des nouvelles des deux la veille au soir? Et est-ce que Chateaubriand est mort ou vivant. Me revient que je vis en 2014 et que j'ai soixante ans. Donc je n'ai pas à aller au lycée c'est déjà ça de pris. Et il n'y a pas la guerre. Oui tous les matins en me réveillant je pense à ça. En même temps je me lève avec mal partout. (C'est un reportage non édulcoré). En général Absinthe dort sur mon oreiller, là où j'avais posé ma tête en m'endormant, et j'ai dormi avec les pieds qui dépassent de la couette. Ce n'est pas grave. Parfois elle m'a vomi sur la tête pendant la nuit aussi. Ce qui ne me dérange pas car je suis barjo.
Dans la cuisine je remplis d'eau la bouilloire pour mon thé. Il y a des mois entiers où je me fais un chocolat chaud le matin puis des mois entiers où l'idée de me faire un chocolat chaud me parait incommensurable. Pendant que l'eau bout je prends mon médicament du matin (levothyrox 100) et je plie les chaussettes de mon chéri qui sèchent sur le sèche linge brinqueballant de la cuisine. Pourquoi j'adore plier les chaussettes? Va savoir. (Vas plutôt pas savoir, tiens !) Je verse l'eau sur le sachet de thé (aucune exigence envers le thé, j'ai, je suis l'anti bobo de base, je m'en fous. J'ai même un faible pour les sachets du genre thé au caramel bien chimiques premier prix). Et pendant que le thé refroidit, voyez mon sens de l'organisation, je donne des croquettes aux chats. En général Absinthe s'est allongée langoureusement à ma place style enfin elle dégage enfin seule moi Absinthe avec son chéri. Et Jimmy tourne autour de mes jambes avec des yeux de merlan frit. J'ouvre les rideaux. Vue magnifique sur le parking noir. J'entre dans la salle de bains où la pile de linge sale dans le panier à linge sale (Louise se change beaucoup) me donne le premier coup dans le moral de la journée. Parfois je fais une lessive le matin. Je vois alors dans la glace de la salle de bains que contrairement à ce que je pensais en me réveillant, je n'ai pas soixante ans, mais cent. Je suis livide, défaite, c'est bien triste. Je prends une douche en pensant au boulot. (Eh oui je ne fais pas exprès d'y penser, je suis détraquée). Je m'habille en ayant envie de me recoucher pendant quelques semaines. Je bois mon bol de thé avec délices, quel bonheur mais quel bonheur un bol de thé chaud, puis je change l'eau des chats.
Epuisée par tous ces efforts et accompagnée par ma seule et riche vie intérieure -vous noterez que je n'écoute pas la radio, que je n'ouvre pas la télé, que je ne mets pas de musique- j'attrape mon sac (que j'ai un peu allégé cette année, il ne fait plus que 30 kilogs), je ferme la porte tandis qu'Absinthe surgit et me donne un petit coup de patte sur le bras, toujours le même, montée sur le petit meuble d e l'entrée à côté de la porte. Je dis "bonne journée les chats" et j'appelle l'ascenseur, "ascenseur, ascenseur" en préparant mon rouge à lèvres. L'ascenseur arrive (ce reportage est d'une intensité) et je mets mon rouge à lèvres devant la glace de l'ascenseur. Des fois quelqu'un un connard a appelé l'ascenseur, MON ascenseur du matin, au troisième (ou au quatrième, c'est un exemple hein) et je dois arrêter de me regarder dans la glace pour dire bonjour puis bonne journée vous aussi merci.
Et alors, je sors de l'immeuble, et c'est le deuxième moment de grand bonheur de la journée mais alors vraiment grand, une bouffée large, c'est quand je sens l'air du dehors. Hiver comme été, en toute saison, vous ne pouvez pas savoir à quel point j'adore sortir dehors sous le ciel, sentir l'air, parfois entendre les oiseaux, voir la lune, entendre le vent, sentir la pluie, immense sensation d'être vivante, les poumons pleins de bonheur.
Je vous raconte la suite demain?
05:46 | Lien permanent | Commentaires (23)
08/12/2014
"Bambi, l'histoire d'une vie dans les bois " est un roman écrit en 1923 qui ensuite a inspiré Disney (vous n'avez pas perdu votre journée).
J'ai vu cette couronne de Noël (ou d'hiver ?), irrésistible de grâce, non?, sur le blog de Deedee et c'est une création du studio Ouiouioui.
20:45 | Lien permanent | Commentaires (12)