Bruyéreux

 

Madame Kon-Kon (c'est moi) a besoin de lunettes pour voir de près, mais madame Kon-Kon ne va pas chez l'ophtalmo parce qu'il est loin (alors elle ne voit pas où il est, parce qu'aussi elle est très myope) et aussi parce qu'elle sait qu'il va lui dire de faire un fond d'oeil, et que rien qu'à cette idée elle tombe dans les pommes, Madame Kon-Kon n'est pas très courageuse, c'est comme les analyses de caca qu'il faut faire un certain âge venu, Madame Kon-Kon aura un jour un cancer du colon ça sera bien fait pour elle, d'ailleurs on ne plaisante pas avec ces choses-là, madame Kon-Kon est vraiment très kon-kon.

D'autant plus kon-kon que donc elle a de plus en plus de mal à lire (l'âge bien sûr, cet âge avancé qui lui donne cette sérénité lumineuse qui impressionne tout son entourage et la laisse de marbre devant les hurlements d'une lycéenne persuadée tous les matins que c'est moi qui cache son écharpe, sa carte de cantine, ses clés, et j'en passe, exprès pour l'embêter, de marbre devant les agissements de ses collègues, de son chef, de la terre entière et même de François Hollande -ce n'est pas sa liaison, à Hollande, avec le général Petraéus qui va m'émouvoir- et même devant l'effet de serre, et même devant les nouvelles pailles d'or à la cerise, mais donc pas que l'âge, aussi certainement les effets néfastes du travail salarié beaucoup sur l'ordinateur, sans compter le temps à écrire des billets, regarder des tableaux, lire des blogs épatants, essayer de comprendre ce que dit Solko , passer des heures devant des vidéos qui expliquent comment faire des chignons "romantiques", et j'en passe) et donc je lis beaucoup moins qu'avant. Quelle tristesse. Non mais quelle tristesse.

Donc tout ça pour dire que j'ai lu contre toute attente il y a quinze jours "La dame du manoir de Wildfell Hall" -c'est pour ça que j'ai mis la photo, pas si con madame Kon-Kon! - écrit par une des "soeurs Brontë" comme on dit, et c'est très très bien, tout le contraire de neuneu, un livre que toutes les jeunes filles devraient lire, pour ne pas s'embarquer dans des mariages affreux. J'aime beaucoup la première phrase: "Remontons si tu le veux bien à l'automne 1827". C'est bien construit, c'est bruyéreux à souhait (= plein de bruyères) et drôle des fois, c'est fin, c'est bien quoi, vraiment bien, et ce n'est pas cher c'est un poche. C'est à lire maintenant, pas au printemps. (si c'est pas de la haute critique littéraire ça!)