04/11/2012
Je suis une brute. Je n'ai pas aimé "Amour", le film de Michael Haneke.
J'ai vu à 14h "Amour", le film de Haneke. Bon, je n'ai vu aucun autre film de lui , je m'en suis toujours gardé comme de la peste, j'imagine que j'ai dû voir des extraits et en conclure que pour voir Isabelle Huppert s'enfoncer des lames de rasoir dans le sexe, merci bien. Or j'ai toujours fait confiance à ma mauvaise foi. Et puis voilà "Amour" et j'entends les cris: "Chef-d'oeuvre! chef d'oeuvre!" Alors comme je suis autant badaud que de mauvaise foi, je me laisse influencer. Sans doute aussi à cause de Trintignant. Pas à cause d'"Un homme et une femme" -horreur de ce film-, mais en souvenir par exemple de "La course du lièvre à travers champs", un film de René Clément , des années 70, avec Trintignant en lièvre, qui court... à travers champs. Il courait bien avec les coudes bien serrées contre le corps. Comme un lièvre. Et puis "Ma nuit chez Maud" bien sûr, film adoré. Et puis son sourire, sa voix.
Donc d'abord je ne voulais pas voir ce film. J'avais mes raisons: une histoire apparemment pas des plus poilantes, un titre de film qui a un nom de parfum Lancôme ou Dior ou Chanel enfin bon, un titre ridicule à mon avis, une palme d'or, c'est à dire le genre de film où tout le monde se met debout et pleure et applaudit sur la croisette, et en plus un film de Haneke.. ça me rébarbativait bien.
Et puis j'y suis allée. Et je ne suis pas charmée du tout. Sauf la petite scène où Trintignant raconte un enterrement auquel il est allé. Très bien. Drôle. Mais sinon, non vraiment ça sert à rien.
Si vous voulez y aller, ne lisez pas ce que je vais écrire, je vous laisse vous faire votre opinion hein!
Donc déjà, l'embêtant c'est que c'est un film avec Isabelle Huppert. On ne la voit pas beaucoup mais on la voit quand même. Et elle est -comme toujours?- insupportable. Certes son personnage est un peu sensé l'être. Raison de plus.
Ensuite, ce qui est super énervant c'est ce truc, sans doute que c'est le truc de Haneke, vous savez "le regard clinique et froid"l. Eh bien tu parles d'un scoop, le regard clinique et froid (klinikéfroi) de Haneke nous montre que quand on a une attaque cérébrale si on reste à moitié paralysé, on ne peut plus aller aux toilettes tout seul et que quand on vieillit si on est très malade on a des couches, ouh sans blague. Moi qui croyais que quand on était très malade on courait à travers champs en bermuda et en bikini (ou en lièvre), en voilà une nouvelle.
Et en plus quand on vieillit, quand on est gravement malade, et dans une situation desespérée, on a mal, on en a assez, ce n'est pas une vie, et on ne crie pas "aïe aïe" mais "ah ah" et ces râles de douleur sont déchirants (ce que tout le monde sait sauf à n'avoir jamais été voir quiconque d'âgé et très malade dans un hôpital- pas âgé non plus d'ailleurs).
Et ce n'est pas beau à voir. Ce n'est pas moi qui le dis c'est Trintignant qui ferme la porte à clé de la chambre de sa femme pour que leur fille ne la voie pas. Ah ben merde je n'avais jamais remarqué. Avec toutes ces vieilles femmes malades en couverture des magazines féminins aussi, c'est trompeur.
Bon. J'en passe. Ah si, quand même à la fin, Trintignant en a aussi marre que nous, alors il étouffe Emmanuelle Riva qu ien a plus que sa claque elle aussi et le signifie, avec un oreiller. Il était temps. Bon. Je plaisante. Mais c'est quand même bizarre, les critiques de ce film ne parlent pas de ça. Comme si c'était la barbe.
Remarque, oui, c'est la barbe.
Bref, pour moi, voilà ce que le film dit: il s'esbaudit qu'un couple âgé puisse s'aimer et se secourir -ce qui est quand même le cas de nombre de couples âgés et dit donc le contraire de ce qu'il semble dire. Il s'émerveille (et les critiques avec) de ce qu'il pense être l'exception qu'il raconte. Il (Haneke ou le film? ) pense tellement que c'est rare qu'il a eu besoin d'ajouter des trucs bizarres, qui sont d'ailleurs les belles choses du film: le thème de l'eau qui coule et les pigeons (très belles scènes avec les pigeons. Qui s'aiment d'amour tendre. NB: décidément le pigeon est à la mode).
Ce couple âgé qui écoute Schubert dans son salon plein de livres est un couple très plausible. Mais je n'y vois pas d'amour. J'y vois l'amour passé. Mais maintenant la tendresse, la fidélité, la sagesse, la bonté, la douceur. Vous me direz que c'est comme l'amour, que c'est de l'amour. Oui! Mais jouez pas aux plus finauds avec moi!
Je croyais que dans ce film on les verrait se coucher l'un contre l'autre, je croyais qu'il lui raconterait des souvenirs d'amour d'eux et pas qu'il lui raconterait sa diphtérie quand il avait 10 ans, je croyais qu'il lui apporterait des fleurs (il l'en couvre...quand elle est morte), je croyais...je ne sais pas ce que je croyais.
En tout cas, merci d'avance de ne pas me chanter le pont d'avignon quand j'aurai un AVC. Merci de m'envoyer à l'hôpital. Merci de ne pas me remonter ma culotte. Merci!
Ah et deux trucs invraisemblables qui m'ont fait rire: les octogénaires ne mangent pas le soir des bons beefsteack saignants et ne lisent pas leur horoscope dans Elle.
18:42 | Lien permanent | Commentaires (8)
Commentaires
Merci Sophie d'avoir trouvé les mots pour dire ce que je n'arrivais pas à dire à la sortie de ce film, qui m'a mis mal à l'aise (et pas à cause du sujet maladie-vieillesse que je trouve filmé avec pudeur) sans que j'arrive à savoir pourquoi.
J'avais aimé pourtant La Pianiste, Le ruban blanc.
Avec ce titre je m'attendais à voir, comment dire, plus grand.
(Trintignant sublime acteur, souvenirs de La nuit chez Maud pour moi aussi)
Écrit par : Marie | 05/11/2012
Marie, oui il y a quelque chose de moins grand que ce qu'on croit, je me demande si le titre (ambitieux quand même!) n'y est pas pour beaucoup; ce qui est bizarre c'est que je n'arrête pas de penser à ce film depuis que je l'ai vu avant-hier...
Écrit par : Sophie | 06/11/2012
Je n'irai pas voir ce film, j'ai horreur d' Haneke. Quand on est vieux et malade, on bave, on fait caca dans des couches, on ne peut plus parler, on ne reconnait plus personne. Merci, je le sais, j'en ai une peur affreuse, j'ai vu ma mère, et l'idée qu'on puisse faire un film avec ça me révulse.
Écrit par : Julie des Hauts | 05/11/2012
Julie, je comprends très bien
Écrit par : Sophie | 06/11/2012
Je ne connais pas ce nouveau film, entendu parler oui!
Sophie vous avez trouver la manière d'expliquer avec pudeur ce que l'on peut devenir, hélas; sujet bien tabou et j'ai une peur affreuse de ce qui peut arriver
Je l'ai beaucoup vécu de par mon travail d'infirmière, ma fin de carrière :15 ans dans une Mapad (devenue éphad) cela vous marque, et lorsque j'étais jeune infirmière à l'hôpital, avant les soins palliatifs systématiques, j'entendais les jeunes et moins jeunes hurler de douleur car la morphine était à telle heure et pas à une autre ; même pour mon père en 1984 il fallait attendre l'heure
Sujet très délicat à traiter, je n'ai pas vu le film aussi je ne peux pas juger
Écrit par : jos | 05/11/2012
Jos je ne savais pas que la morphine se donnait il y a quelques années à heures fixes; maintenant les patients ont souvent une pompe qu'ils peuvent "actionner" "à leur gré", c'est sûrement une amélioration. Mais il y a encore beaucoup à faire pour traiter la douleur infinie des malades en fin de vie.
Écrit par : Sophie | 06/11/2012
trouvé (é) pas (er)
Écrit par : jos | 05/11/2012
bonjour Sophie
oui, la morphine et autres antalgiques puissants étaient proscrits, donnés essentiellement en fin de vie, à heure fixe et pas une autre, il y a moins de 20 ou 30 ans , c'est un progrès humain mais elle ne fait pas tout encore, les pompes à morphine je connais, mais il y a encore à faire pour les douleurs chroniques du corps viellissant ou malade sans vous "couper" de la réalité
Écrit par : jos | 07/11/2012
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