07/11/2012
L'entéléchie et le fauteuil roulant
Roland Barthes, très belle photo, très beau
Je ne connaissais pas ce mot ce matin. Tiens, on pourrait penser que c'est un mot qui a à voir avec la télé, quelque chose comme le fait de regarder la télé alors même qu'elle nous fait chier ou quelque chose comme ça. On pourrait dire: "quand je regarde Pujadas, qu'est ce que je m'entéléchie". Mais en vrai c'est plus aristotélicien que Pujadas, bref c'est en lisant Barthes pendant le petit déjeuner tout en regardant le dépliant de Simply Market et ses "24 jours de prix explosifs" (la vache) que j'ai vu le mot "entéléchie" écrit et que j'ai regardé dans le dictionnaire ce qu'il veut dire. Je sais que c'est dans les Nouveaux essais critiques, mais je n'aurais pas dû regarder les prix explosifs en même temps, -du rôti de porc à 5, 95 le kilog, c'est dingue s'il est bon, non? - parce que je ne retrouve plus où j'avais lu entéléchie. Je cherche dans les pages sur la Vie de Rancé et je ne trouve pas. Je cherche aussi dans ces lignes sur Loti que je n'avais jamais lues et entéléchie s'est enfui.
Alors ne pouvant recopier les lignes où Barthes parle de l'entéléchie (mais je retrouverai !) je recopie ce passage auquel je n'avais jamais fait attention et qui ce matin m'a beaucoup plu, dans le chapitre "Pierre Loti: Aziyadé" (donc dans les Nouveaux essais critiques, et c'est en poche aux éditions du Seuil)
" La déshérence.
Il y a quelques années encore, pendant l'été, le quartier européen de la ville de Marrakech était complètement mort (depuis, le tourisme l'a revogoré abusivment); dans la chaleur, le long des grandes avenues aux magasins ouverts mais inutiles, aux terrasses à peu près vides des cafés, dans les jardins publics où ça et là un homme dormait sur un gazon rare, on y goûtait ce sentiment pénétrant: la déshérence. Tout subsiste et cependant rien n'appartient plus à personne, chaque chose, présente dans sa forme complète, est vidée de cette tension combative attachée à la propriété, il y a perte, non des biens, mais des héritages et des héritiers. Tel est le Stamboul de Loti: vivant, vivace même, comme un tableau coloré, odorant, mais en perte de propriétaire: la Turquie à l'agonie (comme grande puissance), le modernisme aux portes, peu de défense et çà et là le culte du démodé, du raffinement passé -du passé comme raffinement..."
Roland Barthes aimait parait-il cette histoire d'un malheureux en fauteuil roulant, qui alla à Lourdes, se baigna dans une fontaine bénite et en sortit avec un fauteuil roulant neuf.
23:17 | Lien permanent | Commentaires (8)
Commentaires
Bonsoir Sophie, je vous ai lue et vous "m'épater" toujours par vos réflexions et vos trouvailles ;
Écrit par : jos | 07/11/2012
oui eh bien encore une belle faute de non relecture, (vous m'épater..ez)
Écrit par : jos | 08/11/2012
C'est drôle, nous évoquions tout à l'heure la mort de Barthes chez Frasby.
Entéléchie, oui, joli mot. J'ignore le sens.
En même temps Barthes, Kristeva, le groupe Tel QUEL... ont dit et pensé bcp de conneries.
Beaucoup d'entélechies...
Écrit par : solko | 08/11/2012
Oui...et ils ne sont pas les seuls ! Mais Barthes a écrit des très belles choses et il aimait la Vie de Rancé! (et quel bel imperméable! Je pense que Monsieur Rivière en a un comme ça)
Écrit par : Sophie | 08/11/2012
Essence de l'âme. Etat de perfection, de parfait accomplissement de l'âme (Aristote).
Principe métaphysique qui détermine un être à une existence définie.
Je ne suis guère plus avancée, sauf que ça n'a aucun rapport avec Pujadas.
Écrit par : Julie des Hauts | 08/11/2012
La pluie qui passe ne fait pas trop avancer le schmilblick !
Écrit par : Sophie | 08/11/2012
j'adore l'histoire du fauteuil roulant. Est-ce que ça marche avec les vieilles bagnoles que Fidel passe son temps à réparer ? Si oui, est-ce que ça vaut le déplacement ?
Écrit par : la Mère Castor | 08/11/2012
Je ne sais pas si ça marche -hi hi c'est le cas de le dire! Mais Fidel aimerait-il une bagnole toute neuve à la place d'un vieux modèle amoureusement rafistolé? ("amoureusement rafistolé", je n'ai pas souvent l'occasion d'employer cette expression !!!!)
Écrit par : Sophie | 08/11/2012
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